R.M.N. Belgique, France, Roumanie, Suède 2022 – 125min.

Critique du film

Ce village nous appartient

Critique du film: Teresa Vena

Cristian Mungiu explore les affres et la xénophobie d’un petit village roumain confronté à l’arrivée de travailleurs étrangers.

Comme beaucoup de ses compatriotes, Matthias (Marin Grigore) est parti trouver du travail en Allemagne. Mais après une dispute avec son supérieur, il démissionne et rentre en Roumanie. Sa femme et son fils, qu’il n'a pas vus depuis longtemps et desquels il s’est doucement détaché, sont loin de l’accueillir à bras ouverts. Dans la petite ville de Transylvanie où il vit, l'ambiance est triste, lugubre et le travail est rare. Il y aurait bien un employeur : la grande boulangerie dirigée par l'ex-petite amie de Matthias, Csilla (Judith State). Elle aimerait embaucher du personnel, mais pour beaucoup, le salaire proposé n’est pas suffisant. Or, pour pouvoir prétendre à des fonds européens, l'entreprise doit employer un nombre minimum de salariés. Csilla se voit contrainte d'embaucher une population étrangère.

Lauréat de la Palme d’or en 2007 pour le film 4 mois, 3 semaines et 2 jours et après son chef-d'œuvre Bacalaureat en 2016, le cinéaste Cristian Mungiu présentait cette année en compétition cannoise son nouveau long-métrage. Scanner de la population roumaine, le réalisateur d’Iași dévoile avec R.M.N («Rezonanță magnetică nucleară» ou «IRM» en français), un nouveau drame, oppressant et perturbant, dans lequel le clientélisme et le courage moral révèlent toute leur importance. Le long-métrage véhicule une image ouvertement pessimiste de la société roumaine, dont les travers conservateurs pourront faire échos à certains de nos discours politiques sur le racisme, l'immigration ou les conditions de travail. Lavé d’une photographie enneigée étouffante, R.M.N. est un thriller social passionnant qui puise sa force dans sa profonde et intimidante réverbération du réel.

(Festival de Cannes 2022)

(Texte original en allemand)

11.11.2022

4

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CineFiliK

il y a 2 ans

“L’ours” 

Suite à une altercation, Matthias fuit l’Allemagne et retourne en Roumanie. Il y retrouve sa femme distante, son jeune fils devenu muet après un choc et sa maîtresse qui a engagé des Srilankais pour travailler dans la fabrique de pain.

Dans les montagnes de Transylvanie vit tant bien que mal une petite communauté multilingue. La mine a fermé et nombreux sont ceux qui ont tenté ou tenteront leur chance dans l’Allemagne voisine. Néanmoins, une sérénité demeure autour de l’église du village, l’école, le club de hockey, le folklore et cette boulangerie industrielle. Mais l’arrivée de migrants va perturber cette cohésion fragile et faire ressortir la peur, les rancœurs et la haine.

Cristian Mungiu radiographie l’état de son pays et à travers cette IRM évocatrice la désunion européenne. L’idéal voudrait que l’on soit tous frères, malgré les frontières, l’histoire, la culture, les langues. Mais la crainte qu’autrui s’empare du peu que l’on possède reste la plus forte. On s’exile pour gagner plus, refusant les bas salaires locaux et rejette ceux qui les acceptent. A l’étranger, Matthias se fait traiter de « sale gitan », alors que les mains brunes pétrissant le pain dégoûtent certains clients. Le racisme est partagé et la xénophobie intrinsèque éclate dans un long plan-fixe magistral qui réunit l’ensemble des protagonistes tentant de débattre. « Nous n’avons rien contre les autres, tant qu’ils restent chez eux ! ». Le froid ambiant de Noël ne réchauffe pas les cœurs et la valse triste de In the mood for love résonne comme une litanie mélancolique. Une « faute d’amour » rappelant le cinéma glaçant d’Andreï Zvyagintsev. Mais dans sa fresque dense et ambitieuse, Mungiu y ajoute une touche inattendue de fantastique. Car en cette forêt sauvage où l’on égorge bien les moutons, l’ours rôde, moins féroce sans doute que l’être humain.

(7.5/10)Voir plus

Dernière modification il y a 2 ans


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